C’est la question que se pose Sébastien Guèze, célèbre ténor français. Chaque secteur de la société ayant son rôle à jouer dans la transition vers un monde plus responsable, c’est aussi le cas de l’Opéra.
Sébastien Guèze : Quel futur pour l’opéra ?
Dans son essai paru en octobre 2021 intitulé BIOpéra – un futur pour l’Opéra ? Sébastien Guèze expose le devoir d’exemplarité qui repose sur cette institution de prestige. En trois temps, il tire le constat de la situation actuelle, aborde des solutions applicables au monde de l’opéra et propose des initiatives qui permettraient de basculer vers un art lyrique décarboné.
Il rappelle dans un premier temps, que la culture dans son ensemble est un domaine assez peu conscient de son empreinte carbone et de son poids dans les émissions de gaz à effet de serre. Mais comme le temps n’est plus aux chiffres étourdissants non suivis d’actions concrètes, cet essai invite les artistes du monde de l’opéra à devenir les “artivistes” dont le monde de la scène a besoin.
Des grandes actions aux petits gestes : pourquoi transformer de fond en comble le monde de l’Opéra ?
Pour se prémunir et se préserver. Le principal objectif de l’opéra devrait désormais être, selon Sébastien Guèze, celui de rendre la culture accessible à tous.tes sans mettre en danger l’avenir des générations futures en endommageant notre planète.
Les moyens d’agir sont multiples, certains étant assez simples : interdire les plastiques, favoriser les achats de matières premières locales, proposer des plats végétariens ou encore choisir un fournisseur d’énergie renouvelable.
D’autres demandent de mettre en place des outils spécifiques d’aide à la transition. La construction d’un BIOpéra score, l’utilisation de billets de spectacle responsables, dématérialisés qui permettraient d’accéder au diagnostic carbone de l’événement, sont autant d’exemples qui pourraient être mis en œuvre dans un spectacle vivant décarboné. Ces outils aideraient par ailleurs le spectateur à devenir plus conscients de l’impact carbone d’un loisirs culturel.
Sébastien Guèze propose également de mettre en ligne une plateforme qui concentrerait l’ensemble des ressources, propositions, pratiques, solutions ou encore innovations sur les enjeux sociaux et écologiques liés à la culture. Il serait également question de rendre la mesure du bilan carbone de chaque institution obligatoire et de la partager au public, tout en proportionnant les subventions accordées à une diminution conséquence de ce même budget carbone.
Réutiliser 80% des décors existants ?
S’assurer que 80% des personnes qui se déplacent pour un casting le fassent via des mobilités douces ? Upcylcer ou recylcler 80% des costumes ? Généraliser les fournisseurs responsables ? Les peintures végétales ? Ces défis sont aussi ambitieux que les enjeux qu’ils impliquent sont importants. C’est à travers ce qu’il nomme le défi 80% que l’auteur met en avant ce pourcentage clef qui permettrait un changement profond dans la manière de produire.
Et puisque la transition écologique ne peut l’être sans une transformation sociétale profonde, Sébastien Guèze propose des changements de pratiques, notamment dans la programmation artistique. Cette activité était jusqu’à présent essentiellement descendante, mais elle pourrait devenir participative avec par exemple le concept d’AGOpéRa soit une convention citoyenne artistique qui arbitrerait sur le programme artistique avec la participation de spécialistes éclairés et éclairant la prise de décision.
Si les mesures concrètes sont essentielles et inévitables, il faut aussi prendre en compte les leviers de changement des mentalités. La culture est par nature vecteur de représentations du monde, c’est pourquoi l’opéra, comme tous les autres secteurs artistiques, a la possibilité et même le devoir de véhiculer les nouveaux récits de la création. En mettant en avant de nouvelles épopées inspirantes, en promouvant une réflexion sur notre monde et les comportements soutenables qui le rendent désirable, l’Opéra a toutes les clefs en main pour tendre un miroir positif à notre société, et donner l’envie de s’orienter vers un monde souhaitable.
Les enjeux sont donc multiples et primordiaux, et le monde de l’Opéra doit s’adapter et s’engager dès maintenant sur cette voie de la transition. Et les artistes qui s’engagent à accompagner ce mouvement, à la façon de ce que propose Sébastien Guèze, participent à l’évolution du secteur dans son ensemble. Pour que l’opéra de demain continue de nous (en)chanter.
Sébastien Guèze, BIOpéra : Un futur pour l’opéra ?