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Il n’y a pas de véritable économie circulaire possible sans collaboration

 

Faire des déchets des ressources est un concept de base de l’économie circulaire. Certaines entreprises réfléchissent ainsi à une possible réutilisation de leurs propres produits et sous-produits. Les plus belles réussites en ce domaine se trouvent néanmoins dans des associations d’acteurs parfois surprenants, comme des salons de coiffure qui endiguent les marées noires ou une entreprise de moquettes qui récupère des filets de pêche. Tour d’horizon de Christian de Boisredon, fondateur de Sparknews.

© Kalundborg Symbiosis Center

Il n’y a pas de déchets, que des ressources en attente d’être revalorisées : voici le credo de l’économie circulaire. Certaines entreprises réfléchissent ainsi à une possible réutilisation de leurs produits usés ainsi que celles de leurs sous-produits, comme Interface. Cette entreprise peu connue du grand public est pourtant le plus grand fabricant de moquettes modulaires au monde avec un chiffre d’affaire net d’1,2 milliard de dollars en 2018. Cette entreprise multinationale se distingue également par son engagement d’éliminer tout impact négatif de l’entreprise sur l’environnement d’ici 2020, la promesse Mission Zero® formulée dès 1994.

 

Pour cela, l’entreprise a développé au cours des vingt dernières années un programme complet de récupération et de recyclage de ses moquettes, créant un support de moquette avec 98% de contenu recyclé ou à base biologique (GlasBacRE®). En 2019, environ 60 % des matériaux utilisés dans les moquettes Interface proviennent ainsi de matériaux recyclés ou biosourcés.  Depuis 1995, l’entreprise a évité la mise en décharge d’environ 136 millions de kilogrammes de moquette et réduit ses déchets de 92% sur l’ensemble de ses activités.

Un habitant de Danajon aux Philippines collecte de filets de pêche abandonnés sur la côte © Net-Works

Les plus belles réussites en ce domaine se trouvent dans la collaboration. Interface a développé avec la Zoological Society of London (ZSL) un programme pour recycler les filets de pêche abandonnés pour en faire des moquettes. Pour produire ces moquettes Net-Works, l’entreprise Interface a réfléchi avec un consortium d’organisations à la meilleure réutilisation de ces filets de pêche qui étaient autrefois un déchet terriblement meurtrier pour la faune marine. Ce consortium a inclus l’ONG ZSL ainsi que l’organisation locale de protection de l’environnement et des communautés Project Seahorse, l’organisme microfinancier Negros Women for Tomorrow Foundation et l’entreprise spécialisée dans le nylon recyclé Aquafil.

 

C’est grâce à la collaboration de l’ensemble de ces acteurs que le projet lancé sur la côte de Danajon, aux Philippines a prouvé ses résultats et a été depuis répliqué au Cameroun. A ce jour, 224 tonnes de filets de pêche ont ainsi été récupérés par des habitants des villages côtiers et transformés en matières premières pour les produits Interface et 2 200 familles ont rejoint le système de microfinance basé sur la collecte.

La collecte de cheveux par la propriétaire d’un salon de beauté situé à Salaberry-de-Valleyfield  © Les Coiffeurs Justes

Exemple d’une telle collaboration plus proche de chez nous : celle initiée par les Coiffeurs Justes. Cette association organise une collecte collaborative auprès des professionnels de la coiffure pour éviter aux chutes de cheveux l’incinération. Les cheveux récupérés dans différents salons de France sont envoyés dans des “sacs à cheveux” vers un ESAT dans le Var. Certains vont être fourrés dans des bas en nylon pour devenir des boudins flottants remparts contre les marées noires. En effet les cheveux retiennent naturellement le gras et ces boudins flottants peuvent absorber les hydrocarbures. Cette alliance surprenante s’est inscrite au niveau régional grâce au consortium des acteurs de territoire de la Provence verte.

 

La symbiose de Kalundborg au Danemark est également un bel exemple d’expérimentation où les acteurs d’un territoire engagent une transition ensemble. Situé à une centaine de kilomètres de la capitale danoise, ce parc industriel a été pensé pour que les déchets d’une entreprise deviennent les ressources de l’autre. L’entreprise Novozymes récupère par exemple la vapeur d’eau issue de la centrale thermique pour la production de ses enzymes. La centrale thermique transfère quant à elle ses déchets de gypse à l’usine voisine de Saint Gobain Gyproc qui l’utilise comme matière première pour fabriquer du plâtre.

Les sacs à dos Continew sont réalisés à partir d’intérieurs de voiture recyclés © Continew

A mes yeux, la collaboration nécessaire pour la sortie du modèle linéaire ne se limite néanmoins pas à des alliances d’entreprises. La jeune pousse sud-coréenne Morethan recycle les housses de sièges en cuir des intérieurs de voitures, les transformant en nouveaux produits tels que des sacs et petits objets de maroquineries sous la marque Continew. Le partenariat noué avec des constructeurs automobiles et de grandes entreprises était central pour la réussite de ce beau projet mais c’est un autre acteur qui l’a propulsé: le chanteur du boy’s band BTS, premier groupe de K-Pop en Europe et aux Etats-Unis et célébrités les plus commentées sur Twitter en 2017.

 

De tels exemples, il y en a bien plus que ne peut en contenir une seule tribune. Chez Sparknews, nous en sourcons des milliers et nous sommes persuadés que c’est grâce à cet élan de création d’alliances où les déchets des uns deviennent les ressources des autres que la révolution de l’économie circulaire aura lieu. Si vous faites partie d’un tel effort de collaboration, n’hésitez pas à la partager dans les commentaires !

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