L’entreprise, leader mondial en fabrication de moquettes modulaires, a été l’une des premières à se tourner vers des techniques circulaires pour la conception de ses produits, en 1994. Aujourd’hui, ses produits ont atteint la neutralité carbone, mais elle vise encore plus haut.
« Que fait votre entreprise pour l’environnement ? » C’est cette question, posée au début des années 1990 par un de ses clients, qui a poussé le fondateur d’Interface, Ray Anderson, à transformer radicalement la multinationale, fabricant de dalles de moquettes numéro un dans le monde, dans le but d’éliminer complètement tout impact négatif de l’entreprise sur l’environnement.
Son engagement pionnier et ambitieux en faveur de la lutte contre le réchauffement climatique, pris publiquement en 1994, reposait autant sur la réduction des émissions de CO2 et de ses déchets, que sur celle de l’utilisation d’eau et d’énergie. Il visait également à alimenter toutes ses usines, implantées dans plus de 100 pays autour du globe, par une énergie 100% renouvelable avant 2020. Un pari réussi grâce à une approche holistique et circulaire, selon les dernières analyses d’Interface.
Avec environ 3500 salariés autour du globe, l’entreprise fondée en 1973 et basée à Atlanta (Etats-Unis) vient d’atteindre la neutralité carbone sur tout le cycle de vie de son produit phare, les moquettes modulables pour les bureaux commerciaux. Ses sites américains et européens fonctionnent aujourd’hui avec une énergie à 99% renouvelable — 89% en moyenne sur l’ensemble de l’entreprise.
Des progrès non négligeables si l’on considère que le secteur du bâtiment représentait, fin 2018, près de 40% des émissions de gaz à effet de serre dans le monde selon l’agence des Nations Unies pour l’environnement. Et que parmi les matériaux de construction, les moquettes utilisées pour les revêtements de sol ont une empreinte carbone considérable en raison des processus de fabrication du nylon vierge à base de pétrole.
Afin d’alléger son impact, Interface s’est donc tournée dès 1994 vers l’éco-conception des dalles de moquette avec du nylon recyclé ou biosourcé, offrant la possibilité de les réutiliser ou de les recycler. En s’inspirant de la nature, l’entreprise a entre autres conçu la première dalle de moquette biomimétique et modulaire au monde, Entropy, dont le motif non-directionnel permet de réduire les déchets générés lors de l’installation de 14% à 1,5%, ainsi que de récupérer les différents composants de la moquette en fin de vie en vue de leur recyclage. Les dalles abîmées à terme peuvent aussi être remplacées individuellement sans changer toute l’installation, prolongeant ainsi la durée de vie de la moquette.
C’est à travers son programme baptisé ReEntry que l’entreprise récupère et réutilise ces dalles de moquette en fin de vie dans de nouvelles conceptions de revêtements depuis 1995. Depuis son lancement, ce programme a évité la mise en décharge d’environ 136 millions de kilogrammes de moquette, notamment en Californie. En optimisant parallèlement la fabrication de ses produits grâce à un processus de découpe laser à ultrason et la réutilisation des déchets issus de ces découpes, l’entreprise a ainsi réussi à réduire ses déchets de 92% sur l’ensemble de ses activités.
Mais, au-delà de donner une seconde vie à ses propres produits —ou ceux de ses concurrents—, Interface se procure également d’autres types de déchets pour fabriquer ses dalles de moquette. Le programme NetWorks, lancé aux Philippines en 2012 en partenariat avec son fournisseur de nylon Aquafil et la Zoological Society of London, a permis à l’entreprise de récupérer autour de 224 tonnes de filets de pêche des habitants des villages côtiers et de les transformer en matières premières pour ses produits. Répliqué depuis au Cameroun et en Indonésie, le programme bénéficie aujourd’hui à environ 2200 familles locales.
Ainsi, à l’heure actuelle, environ 60 % des matériaux utilisés dans ces moquettes proviennent de matériaux recyclés ou biosourcés. Cela, couplé à ses efforts en matière d’efficacité énergétique, a permis à Interface une réduction de 69% de l’empreinte carbone pour toute la durée de vie de ses moquettes, atteignant la neutralité carbone à travers l’achat de crédits de compensation destinés à des projets de reforestation ou de développement d’énergie verte et vérifiés par Bureau Veritas.
Leur prochain pari ? Faire du CO2 une ressource dans la conception de ses produits en utilisant de nouveaux matériaux qui le stockent, afin d’avoir une empreinte carbone négative.
Cet article a été écrit dans le cadre d’une série produite pour open_resource par Sparknews, une entreprise sociale française qui vise à faire émerger des nouveaux récits pour accélérer une transition écologique et sociale à la hauteur des enjeux de notre époque.